mardi 14 mai 2013

Contribution d'Alban Jutteau




Le rêve de tout parent d’une tête blonde bien faite, est de voir son rejeton admis au sein de l’une de nos plus prestigieuses écoles supérieures. Non la moindre d’entre elles est l’ENA. Au sein d’une de ses promotions, la qualité des étudiants et l’émulation née entre eux lui ont donné régulièrement droit aux honneurs de la presse. C’est la « promotion Voltaire ».



L’un de ses étudiants, au bout de 32 ans de travail acharné, de stratégie de carrière brillamment menée, ancien premier secrétaire du Parti Socialiste, a été élu Président de la République. Qu’il serait léger de juger le travail d’un tel homme à la lecture de sa seule 33ème année de labeur! Absence de ligne directrice, tergiversations ? Que nenni ! Il y a certes une dissonance notoire entre le chant des promesses électorales et leur mise en œuvre, mais c’est là le propre d’une démocratie.


Ce n’est même pas sur ces 33 ans qu’il faut analyser la philosophie de M. Hollande, mais à la lumière de l’histoire du socialisme.




On attend du socialisme une organisation économique et sociale allant dans le sens d’une égalité des conditions, matérielles en particulier. 



En 1905 sur injonction de l’Internationale, le socialisme en France s'unifie dans la nouvelle Section Française de l'Internationale Ouvrière (SFIO). Jean Jaurès sera le premier à balancer entre les traditions de révolution française et l’internationalisme associé au pacifisme. En 1920 au congrès de Tours, Léon Blum conduit le SFIO à s’écarter de la voie internationale à laquelle seule adhère ce qui deviendra le Parti Communiste Français.
Ce n’est qu’après la seconde guerre mondiale que renaît l’Internationale Socialiste, de la conférence de Clacton en 1946 au congrès de Francfort en 1951.



Au départ quasi exclusivement européenne, l’Internationale Socialiste accroît son emprise territoriale après la disparition des colonies et la chute des régimes communistes d’Europe de l’Est.

Le parti socialiste Français est membre de plein droit.



Sur le plan économique les déclarations de principes issues du congrès de Stockholm (1989) rappellent qu’une économie mondiale ouverte peut stimuler le développement du Sud. De même mettre fin à la pauvreté, dans le Sud, est un projet commun pour le Nord. Son dernier rassemblement (Le Cap, 2012) avait pour mot d’ordre «Pour un nouvel internationalisme et une nouvelle culture de solidarité». Ce Congrès a réaffirmé le besoin de donner en particulier la priorité à l’approche de la solidarité quand on faisait face aux défis tels que les inégalités mondiales grandissantes.

Le poids de l’histoire, l’esclavagisme qui a appauvri les pays moins développés, le colonialisme qui a fini de les asservir, sont à l’opposé des fondamentaux socialistes.



Alors qu’en France une personne peut, sans travailler, nourrir sa famille, la loger, la soigner gracieusement, il est des pays dans lesquels cet espoir n’est offert qu’à une infime partie de la population.



Qu’un Homme consacrant toute sa vitalité à créer quelque richesse voit mourir ses enfants au moindre aléa de santé, ne puisse les éduquer, ne puisse leur offrir un espoir d’une vie meilleure pour la simple raison qu’il est né dans une zone déshéritée de la planète est révoltant, profondément. Le malheur des classes sociales européennes dites « défavorisées » est pour le moins relatif comparé à cette injustice ô combien plus criante.



Un Homme d’Etat d’envergure tel François Hollande sait tout cela et sa hauteur de vue le conduit à inscrire une vraie page sociale non à l’échelle de la France mais à celle de l’Histoire, de l’Histoire du monde.



La fonction qui lui a été confiée le lui permet.



La création de richesse nécessite des compétences, du travail, des capitaux, une culture de la création de valeur. Ce sont donc ces fondamentaux que M. Hollande veille à répartir.


Simplement distinguons bien les faits et les discours.



Dans un contexte de compétition internationale, les possesseurs de capitaux s’éloigneront du territoire national si la taxation des capitaux s’accroît. Ainsi les biens accumulés sont incités à quitter l’hexagone, via l’ISF (la France est l’un des derniers pays à conserver cet outil fiscal efficace) ou via des prélèvements élevés lors de la cession des outils de production. L’absence de données officielles précises est bien regrettable pour mieux analyser son résultat.
Dans le même esprit les plus grands créateurs de richesse voient les prélèvements atteindre des niveaux confiscatoires. Presque tous ne créent ces richesses que par leur action internationale. Rares sont en effet ceux qui gagnent des millions en limitant leurs actions à leurs terres d’origine, qu’ils soient chef d’entreprise, footballeur, cadre dirigeant, artiste ou autre. Ils sont donc faciles à inciter à poursuivre leurs actions, à créer une émulation, à développer des activités économiques sous d’autres cieux. Puissent grand nombre d’entre eux aller vers des pays en ayant plus besoin.



Un autre fait bien ancré et bien orienté dans cet esprit est l’évolution du taux de prélèvement obligatoire. Il devrait être de 46,5% en France en 2013, c’est à dire le second plus important de la zone euro. Or chaque fois que l’on augmente la dépense publique de 1%, on diminue la valeur totale produite de 0,4% et on transfère des emplois. Ce haut niveau de taux de prélèvement, qui découle d’une croissance continue depuis des décennies, induit donc là aussi un transfert de la richesse mondiale vers d’autres pays.



Les communicants étant de plus en plus pointus, le décryptage de la limite entre les faits et les discours nécessite un grand discernement. 



Ainsi l’appel aux capitaux internationaux lancé récemment par M. Hollande en Chine n’est que de pure forme. Il n’a fallu que quelques jours pour que les faits viennent confirmer la profonde volonté du gouvernement en la matière, son ministre du redressement productif interdisant la reprise d’un fleuron français d’hébergement et de visionnage vidéo par un groupe étranger. Les faits sont têtus…
Le rôle de la banque publique d’investissement serait-elle alors un non-sens ? 



Bien au contraire, elle répond d’une certaine logique. Le rôle de la BPI n’est pas un apport aux entreprises à potentiel mais un soutien aux "entreprises en retournement", c'est à dire en difficulté. Sa fonction première est donc de montrer combien l’Etat s’intéresse aux cas publiquement « lisibles ». C’est pourquoi l’un de ses postes clés est celui de « porte-parole », attribué à Mme Royal, par ailleurs vice-présidente de l’Internationale Socialiste.



Par contre cette banque n’est pas massivement ouverte aux employeurs de demain. Officiellement, cette tâche est dévolue aux banques privées…Le taux de marge des sociétés produisant des biens et services non financiers est de 28,6% en France, de 34,4% en Allemagne et de 38,3% en zone euro. 


Les choix des investisseurs étrangers est vite fait, discret, efficace.



Autant on parle des entreprises qui ferment, autant on reste discret sur celles qui n’ouvrent pas. 
Bref, tout dans la politique de M. Hollande contribue à transférer la création de valeur, à réduire la surconsommation dans notre pays nanti, à porter assistance à des territoires où les compétences et les capitaux sont rares, à créer des emplois dans des pays sans salaire minimum et à taux de chômage plus élevé qu’en France.



M. Hollande arrive donc à un moment clé de l’histoire du Monde, dans lequel la mondialisation a supprimé les murs douaniers, accéléré les mouvements internationaux de marchandises, de capitaux, de compétences.
Ces décisions sont-elles couronnées de succès ?



Ce chemin, ses prédécesseurs en avaient griffonné les premières esquisses. Il le trace dans la durée, avec des décisions déjà presque irréversibles. Les jeunes générations qui sortent à leur tour de formations supérieures en France le savent bien. Presque toutes issues de familles plus aisées et plus cultivées que la moyenne sont conscients de cette évolution de société que subissent de plein fouet leurs parents.



Cette prise de conscience est d’autant plus forte dans les milieux brinquebalés par la mondialisation (le secteur privé) par opposition à ceux travaillant dans les secteurs protégés. Il y a un siècle, se marier avec une femme du village voisin valait traîtrise. Il y a 30 ans, monter à la capitale était symbole de carrière de haut vol. Aujourd’hui tout étudiant conduit à travailler dans le secteur concurrentiel passe une partie de son cursus hors frontières, et les barrières de la langue n’en sont plus.



Ces grandes orientations sont-elles positives ? Il n’est que de citer l’observatoire des inégalités : « Le nombre de personnes vivant sous le seuil d’extrême pauvreté dans le monde s’est réduit de 1,9 à un peu moins de 1,3 milliard entre 1981 et 2008. Une évolution d’autant plus positive que dans le même temps la population mondiale s’est accrue. Du coup, le taux d’extrême pauvreté a été réduit de moitié : 22,4 % de la population mondiale vit aujourd’hui avec moins de 1,25 dollar par jour contre 52,2 % au début des années 1980.
La plupart des régions du monde ont vu l’extrême pauvreté reculer. La réduction la plus spectaculaire est observée en Asie de l’Est. »



La grande humanité de M. Hollande est d’accélérer ce processus. Sa grande habileté politique est de s’être fait élire par ceux qui, les premiers, seront les victimes de cette évolution : les moins formés, les moins compétents, ceux dont l’avenir international n’existe pas.

Nous ne pouvons que lui souhaiter bonne réussite dans la poursuite de ses ambitions.

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